« Des fois tu aimes ton frère, des fois tu ne l’aimes pas »

Comment instaurer une relation frères et sœurs sans rivalité? Beaucoup de parents se posent cette question. Vendredi dernier Les Petites Cigognes de Wissembourg organisaient une conférence sur le thème des jalousies dans la fratrie.

Près de 50 personnes avaient fait le déplacement pour écouter Catherine Lichti, animatrice d’ateliers Faber et Mazlisch et jeune maman de 2 petites filles de 4 ans et 6 six ans.

Catherine a également été formée à la Communication Non Violente selon Marschal Rosenberg, à la Communication Relationnelle de Jacques Salomé ainsi qu’à la Grammaire des Emotions d’Isabelle Filliozat.

Pendant 2 heures Catherine nous a proposé des pistes pour améliorer les relations frères et sœurs, puis s’est suivi un moment d’échange avec la salle qui s’est terminé par un petit pot.

Accueillir les émotions négatives des enfants et les ventiler

Souvent à l’arrivée d’un nouveau bébé dans la famille et parfois dès l’annonce de la grossesse, l’enfant éprouve des sentiments négatifs envers le bébé.  Pour lui, cela signifie que papa et maman auront moins de temps à lui consacrer, moins d’attention et moins d’amour.

Plutôt que nier ces sentiments, il faut chercher à savoir quel est le besoin qui se cache derrière l’agression verbale ou physique envers le bébé.

On peut également mettre des mots aux sentiments de l’enfant et lui dire :

« Des fois tu aimes ton frère, des fois tu ne l’aimes pas. On n’est pas obligé d’aimer son frère ou sa sœur mais on se respecte. »

Accueillir les sentiments négatifs de l’enfant lui permet de se sentir entendu, écouté et compris. Cela évite d’entrer en conflit avec lui sans pour autant dire que l’on approuve ses gestes ou ses paroles violentes.

Remplir le réservoir affectif de l’enfant

Selon Gary Chapman il existe 5 langages de l’amour.

1/le temps passé avec chacun des enfants. Cela veut dire ne pas répondre au téléphone, ne pas intervenir quand l’autre enfant fait une bêtise ce qui suppose que l’autre enfant est gardé par quelqu’un d’autre ou qu’ il est bien occupé, et ne pas penser à la liste des courses par exemple.  Le temps préconisé est de 10 à 20 minutes par jour et par enfant.

2/ les contacts : câlins, main dans la main…

3/ les paroles valorisantes ou compliments. On met l’accent sur ce que les enfants font de bien. On a trop souvent tendance à pointer du doigt les choses qui ne vont pas.

4/ les petites attentions. Il ne s’agit pas forcément de cadeaux, cela peut-être quelque chose qui n’a pas de valeur pécuniaire comme faire des crêpes ou des gâteaux par exemple.

5/les services rendus

Il important de mentionner les petites attentions ou les services rendus pour qu’ils soient observés par l’enfant et non pas considérés comme normaux.

Le réservoir affectif des enfants fonctionne comme un réservoir d’essence dans lequel l’amour est un carburant. On évite qu’il soit en panne en agissant en amont car lorsque le réservoir affectif d’un enfant est vide, la moindre contrariété déclenche une colère. Au contraire, lorsque qu’il est bien rempli l’enfant peut mieux gérer ses émotions négatives.

Ce principe marche d’ailleurs aussi bien dans les relations de couple.

Éviter les comparaisons

On évite les comparaisons négatives telles que : « Qu’est-ce que tu es lent ! Regarde ton frère, il est déjà prêt pour sortir ! » Si on veut  modifier le comportement de l’enfant on s’adresse à lui comme s’il était unique, sans faire référence à son frère ou sa sœur.

Catherine nous donne en passant quelques pistes pour améliorer la préparation du matin. On peut :

1/ instaurer une routine

2/ Préparer les affaires la veille

3/ Réveiller les enfants plus tôt

4/ Mettre moins de jeux à disposition

On évite de la même manière les comparaisons positives telles que : « Qu’est-ce que tu es bien ordonné ! Ce n’est pas le cas de ton frère ! » L’enfant va se sentir valorisé mais cela met de la pression. Il se dit : « Il faut que je sois à la hauteur des attentes de maman ou papa. »

Il faut considérer chaque enfant comme une personne distincte avec ses propres besoins. Cela veut dire ne pas forcément donner exactement les mêmes quantités à chaque enfant mais donner en fonction des besoins de chacun.

Il en est de même pour le temps passé avec chacun des enfants. Par exemple, si le cadet réclame notre attention alors que nous sommes déjà avec l’ainé et que c’est un moment vraiment important pour lui, le dire au cadet et le faire patienter. « Ton frère a vraiment envie de me montrer comment il sait bien dessiner une voiture. Dès qu’il aura fini son dessin je passerai du temps avec toi ». Et on donne des pistes pour faire patienter le plus jeune.

Enfin, l’amour que l’on porte à chaque enfant est différent et unique. Il faut signifier à l’enfant ce qu’on aime spécialement chez lui, et ce qu’on aime faire particulièrement avec lui.

Ne pas coller d’étiquettes

Coller une étiquette à un enfant est réducteur et le limite dans ses possibilités. On provoque une destinée que souvent on ne veut pas. L’enfant croit en ses parents. Si les parents donnent à l’enfant le rôle de timide, maladroit, sage ou hyperactif, il se comportera comme tel.

Avoir un rôle de médiateur et non d’arbitre

Malheureusement, malgré tous nos efforts on ne peut pas éviter les disputes entre frères et sœurs. Il est tout à fait normal que les enfants se chamaillent entre eux, c’est leur moyen de s’affirmer. Et aussi lorsque les enfants ont faim, sont fatigués ou malades ils arrivent à moins gérer leurs émotions.

Pour diminuer le nombre de chamailleries on peut définir la propriété et le territoire de chaque enfant : quels jeux appartiennent á qui, quel est l’espace dédié à chacun.

Mais que faire lorsque les conflits éclatent ? On se place en tant que médiateur et non d’arbitre. On peut appliquer la stratégie suivante:

1/ Reformuler ce que chaque enfant veut

2/ Avoir confiance en la capacité des enfants de trouver eux-mêmes une solution et leur faire savoir.

« J’ai confiance que vous allez trouver une solution acceptable pour tous les deux. »

Quand ils sont petits on peut donner des pistes. Cette méthode permet aux enfants de trouver des solutions à leur niveau et auxquelles les parents n’auraient pas forcément pensé. Ils se sentent fiers et autonomes et peuvent même appliquer ces aptitudes à l’école. Pour les parents, cela permet de sortir du conflit.

Comment réagir lorsqu’ il y a des coups ?

Lorsqu’ un enfant agresse son frère ou sa sœur on porte d’abord son attention sur la victime. Il aura comme ça moins tendance à utiliser ce moyen pour attirer l’attention du parent.

On rappelle en même temps les règles. Il faut être clair sur ses valeurs, savoir quelles sont les choses négociables et quelles sont les choses non négociables. Il faut également que ces règles soient respectées par l’ensemble de la famille. Les enfants apprennent par imitation.

On propose ensuite à l’agresseur un exutoire à la colère. Cela peut-être de taper dans un coussin, dessiner ou écrire sa colère.

Et enfin, on demande à l’agresseur de trouver une réparation pour la victime. On peut laisser le temps pour la réparation.

Il n y a pas de parent parfait

Pour finir, Catherine nous invite à plus de bienveillance envers soi. En tant que parent on est souvent très exigeant envers soi et on se compare fréquemment aux autres. Mais il n y a pas de parent parfait, on commet tous des erreurs. Eduquer son enfant n’est pas un apprentissage linéaire. On grandit avec l’enfant.

Il est également nécessaire d’identifier nos propres besoins et ne pas les laisser de côtés pour mieux gérer les besoins de nos enfants. Aussi faut-il penser à s’octroyer du temps pour soi, du temps avec son conjoint ou un ami.

Encore un grand merci à Catherine Lichti.

Liens

http://www.parents-simplement.com/

 

Bibliographie 

Chapman, Gary. Langages d’amour des enfants. Broché, 1998.

Faber, Adèle et Mazlisch, Elaine. Parler pour que les enfants écoutent, écouter pour que les enfants parlent.

Faber, Adèle et Mazlisch, Elaine. Frères et soeurs sans rivalité.

Faber, Adèle et Mazlisch, Elaine. Parents épanouis, enfants épanouis : cultiver le bonheur en famille.

Filliozat, Isabelle. J’ai tout essayé !

Filliozat, Isabelle. Il me cherche !

Filliozat, Isabelle. Il n y a pas de parent parfait.

Levisalles, Nathalie. L’ado (et le bonobo) : Essai sur un âge impossible.

Rosenberg, Marshall. Les mots sont des fenêtres (ou bien ce sont des murs) : Introduction à la Communication Non Violente.

Compte rendu de la conférence sur les rivalités dans la fratrie